L'homme marchait seul, cherchant l'homme qu'il était avant le commencement du monde.

Charlotte O'Streack



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AVRIL 88

 

Avril 1988

Avant de partir, avant de laisser tout ça der­rière moi, je voudrais essayer de comprendre un peu, de démêler tout ce qui est noué.

Il n'est pas possi­ble que l'on se soit tant trompé, il n'est pas possible que tout se soit assemblé d'une manière aussi vicieuse, pour qu'au moment le moins oppor­tun, tout s'écroule.

J'ai l'impression d'être écrasée, en morceaux. Chaque lam­beau auquel je m'accroche, part en charpie. Je ne reçois aucun signe, aucune tendresse. L'es­pèce de silence mort dans lequel je m'englue va finir par me bouffer. J'ai une peur de la mort comme j'ai peur de l'inu­tile.

Je ne fais que passer sans savoir où je vais. J'envie les alcoo­liques, je n'aurais pas le courage de me détruire même comme cela.

La façade a toujours été tellement propre, tellement nette, tellement sûre.

Ceux qui croient en une justice immanente, diront que je paye. Je ne sais même plus en quoi je crois. C'est l'une des dernières choses qui est en train de m'échapper.

Peut-être, parce que c'est la seule explica­tion, j'ai cru en quelque chose. Je ne sais plus rien et je n'ai plus grand chose. La solitude n'a jamais été aussi dure. Avant lorsque j'étais seule, c'était com­plète­ment. Je pouvais me cogner aux murs et pleurer tout mon saoul. Même ma solitude m'a été arrachée.

Il ne reste rien de tout ce que j'avais reçu. A force de vouloir connaî­tre, de vou­loir savoir, j'ai ouvert trop de portes que je suis incapa­ble d'ignorer. Je n'ai rien trouvé que le vide. Les autres, il leur reste l'espoir que der­rière les portes, qu'ils n'ont pas osé ouvrir, se cache une vérité qui leur sera un jour révélée.

J'ai voulu forcer les verrous, j'ai voulu inventer la vérité, j'ai perdu la patience des amants, et j'ai ouvert toutes les portes à la volée, pour trouver une terre brûlée qui n'a pas une chance de faire pousser même une mauvaise herbe.

On m'avait confié quelques petites choses impor­tantes. Je n'ai rien su garder. Même la fuite ne me fait plus illu­sion. Avant un avion me rendait un espoir.

Mes chaînes sont trop lourdes. J'aimerais être une chienne qui n'a besoin que d'un os. Avec mon talent, je pourrais passer pour enragée et on ne se poserait pas trop de ques­tions avant de m'élimi­ner.