LIENS
https://www.de-plume-en-plume.fr/
https://www.loree-des-reves.com/
https://www.atramenta.net/
https://www.monbestseller.com/
https://www.oniris.be/
https://www.secondsexe.com/
29 MARS 85
Des jours où tout déborde, où l'aveuglement est tel que je me heurte à tous les murs.
La présence qui occupe mon ventre.
Est-il possible que nous soyons ici pour endurer cela? Pourquoi ces journées, ces nuits où l'esprit erre et se brûle à la glace froide de l'indifférence?
Toujours les mêmes questions, que vais-je faire? Pourquoi?
Et cette réponse d'ignorant qui résonne sans cesse "je ne sais pas, je ne sais pas".
Cette inquiétude qui ne s'endort jamais complètement, que j'apprivoise à coup de kilomètres, de nouvelles têtes et d'alcool.
Cette reconnaissance de mon succès dont je n'arrive pas à profiter car il me semble contre nature;
Cette jouissance que la bête du ventre transforme en chute enivrante.
Ces questions auxquelles j'ai essayé tant de réponses sans en trouver une qui fasse.
Il doit y avoir quelque part quelqu'un qui sait. Il doit y avoir quelque chose qui est suffisamment valorisant pour que nous ne sombrions pas.
Peut-on ignorer tout le reste, tous les autres?
Peut-on passer son temps à se gagner sa vie de tous les jours?
Peut-on laisser filer son temps sans réagir, en laissant fermées les portes qui font des courants d'air auxquels notre âme est bien trop sensible?
Je voudrais crier ASSEZ! Ma violence contenue m'épouvante.
Où partons-nous? Est-il possible qu'il y ait tant d'angoisse en si peu de minutes.
Si j'ai l'air de refuser les gestes des autres vers moi, ce n'est pas par orgueil ou toute autre raison aussi stupide, mais plutôt parce que ma plaie me fait si mal que le moindre geste pour l'expliquer et même la panser me fait hurler.
Il n'y a pas d'explications, il n'y a pas d'aide possible, il n'y a pas de remède miracle. Il y a juste quelques épaules sur lesquelles je peux pleurer et sentir ma peur qui s'en va, ou du moins qui se rétracte un peu face aux gestes de douceur.
Il y a des jours où pas un mot ne m'est pas un fer brûlant.
Une main sur mon front, sans pourquoi sans questions, une main qui communique avec ma peau et patiemment fait le chemin jusqu'à mon âme.
Je cherche, je m'agrippe depuis des années, je n'ai rien trouvé.
La sérénité est un vain mot.
J'ai souhaité mourir mais cette peur même m'a fait refuser la mort sous le prétexte fallacieux que ma disparition allait blesser les autres. Sornettes, lâcheté devant la balle qui éclate la peau, hache la chair et donne au sang un chemin dont il ne revient pas.
Le suicide, une lâcheté? Laissez-moi rire; avez-vous regardé le sol depuis une fenêtre ouverte d'un trentième étage? Avez-vous aligné les pilules en procession de mort sur la tablette de la salle de bain? Avez-vous appuyé le canon froid d'une arme sur votre tempe? Là on ne rit plus; le défi lancé à la mort va s'accomplir.
La petite idée, que nous avons derrière la tête, est fausse, il n'y a pas toujours quelqu'un pour s'interposer au dernier instant. On ne peut pas goûter à la mort pour se faire vraiment peur et en revenir. On meurt ou on ne meurt pas.
Je cours le monde, pas tant à la recherche de quelque chose, mais bien plutôt parce que je fuis l'image de moi-même.
Je vole et ne m'arrête jamais assez longtemps pour que je me reconnaisse. Je me suis enivré à longueur de mois avec la mesquine excitation d'une promotion sociale.
Ca me gênait aux entournures mais j'ai l'habitude de porter mes vêtements étroits. Ca a sauté. Au moment le plus inattendu. J'aurais pu résister, si j'avais su l'imminence de l'explosion, comme j'ai résisté dans le passé.
Mais là mon corps m'a lâchement abandonné, ou bien peut-être en avait-il assez de ne servir que de matériel pour lequel je n'avais qu'ingratitude.
Vous voyez, ce n'est pas grand chose, c'est cette égratignure qui refuse de guérir; c'est cette haine de moi-même qui grandit et prolifère au point de tout me prendre; C'est cette incompréhension que je témoigne aux autres parce que c'est plus simple; c'est cette mauvaise conscience que j'essaie d'oublier en fermant les yeux sur toutes mes compromissions.
On vit toujours par rapport à quelqu'un, en référence à quelqu'un ou à quelque chose... alors...
La ligne sur laquelle on avance est fine et fragile. A nous de la consolider sans perdre le but de vue. Je me suis trop écartée; j'ai perdu mon but de vue pendant de trop longues années.
Le brouillard n'aide pas; J'aperçois parfois un instant quelqu'un qui fait une apparition et je me jette sur ses traces mais bien vite la piste est brouillée et je continue à errer…